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Limiter le stress : le secret de Caroline pour maîtriser son trouble bipolaire

Illustration: Tony H.

Sommaire

Du diagnostic au bon traitementLe stress, encore le stress, toujours le stress !Réduire le stress par tous les moyensUn bilan, somme toute, très positif !

Caroline est diagnostiquée comme portant un trouble bipolaire. Elle est stabilisée depuis un bon moment, et a donc décidé de partager avec vous la clé de cette stabilisation : la maîtrise du stress.

 

Du diagnostic au bon traitement

Atteinte d'un trouble bipolaire de type I et diagnostiquée en 2005, j'ai 46 ans et je suis actuellement stabilisée depuis 9 ans. Avant 2005, j'avais eu des alertes. Notamment, je me souviens de quelques jours où j'avais eu une accélération de la pensée. Je m'étais imaginée être si gravement malade que j'avais passé une journée à planifier l'éventualité de mon décès.

En 2005, un événement familial d'une ampleur sans précédent génère en moi un stress monumental. Je réagis, dans un premier temps, en occultant cet événement. Ma pensée s'accélère. Mes activités aussi. Je m'investis dans la création de bijoux au point d'en oublier le monde qui m'entoure et notamment ma fille en bas-âge (heureusement son père est là pour s'en occuper). J'ai des idées de grandeur, mes pensées deviennent mystiques, je m'interroge sur la possibilité que je sois élue pour sauver le monde.

Ensuite viennent l'hospitalisation et le diagnostic. Après le diagnostic et pendant 6 ans, on me prescrit divers traitements et je subis diverses rechutes et hospitalisations, et c'est en 2011 que m'est donné le médicament qui met un terme aux accès maniaques très violents et dévastateurs que je subis.

 

Le stress, encore le stress, toujours le stress !

Je me rends vite compte que le traitement que je prends est absolument nécessaire pour éviter une décompensation [dégradation brutale d'un organisme dont l'équilibre était maintenu jusque-là par des mécanismes de compensation] qui me reconduirait inévitablement en hôpital psychiatrique. Voilà neuf ans donc que je prends ce traitement mais j'ai cependant des phases d'hypomanie (forme de délire épisodique, caractérisée par une activité excessive, mais atténuée par rapport à une phase totalement maniaque) avec des phases de dépression modérée, et l'élément déclencheur de ces hypomanies est sans nul doute le stress.

 

Il est des événements dans la vie que l'on ne peut éviter et qui produisent du stress certes, mais il y a des moyens de diminuer son impact considérablement. A partir de ce constat, je me suis efforcée de suivre rigoureusement mon traitement et de voir ma psychiatre une fois par mois. C'était la condition sine qua non et préalable à tout autre traitement que l'on pourrait qualifier de "naturel". Dès lors, mon objectif a été de me faire une vie où l'impact du stress serait diminué dans la mesure du possible.

 

Réduire le stress par tous les moyens

Toute vie est faite d'une accumulation de petits stress. Alors, mon but a été de les réduire au maximum.

J'ai ainsi dû stopper mon métier d'enseignante car il me procurait beaucoup de stress et j'ai eu la chance de pouvoir être reclassée sur un poste administratif que j'effectue aujourd'hui à temps partiel.

Je me suis séparée, dans mon entourage, de toutes les personnes qui m'apportaient du négatif, tant dans le cercle amical que dans le cercle familial. J'ai, par exemple, limité les contacts avec mes parents qui me transmettaient leur angoisse, non seulement par rapport à ma maladie, mais aussi par rapport aux événements du quotidien, et je suis plus attentive à la qualité des personnes qui entrent dans ma vie qu'à la quantité. J'essaye aussi, par exemple, de voir ma meilleure amie fréquemment car c'est une personne qui a un don pour m'apaiser et m’insuffler du positif.

 

Je prends du temps pour programmer l'emploi du temps de mes journées qui sont rythmées par le travail, les tâches en rapport avec mes enfants, l'entretien de mon lieu de vie auquel j'apporte un soin particulier pour me sentir bien, mes loisirs et les visites à mes ami·e·s.

Je suis rigoureuse sur mon emploi du temps mais lorsque j'ai une baisse importante de moral et que j'ai du mal à me tenir à mon programme, j'axe mes moments de loisirs sur de l'auto-suggestion positive, et de la méditation que je pratique immergée dans un bain aux huiles essentielles.

Je fais très attention aux pensées négatives qui me traversent et je les transforme en pensées positives telles que : "cet état dépressif est transitoire, toute chimie a ses fluctuations, la dernière fois ça n'a duré que trois jours", etc. Et puisque je note tout, j'ai les preuves à l'appui ! Cela n'a rien de facile mais la pratique rend plus fort et diminue ces temps apathiques.

J'ai appris à me connaître au fil des années, il y a eu des renoncements certes mais au final ma vie s'est

embellie par la stabilité.

 

Il arrive aussi que je sois euphorique et c'est dans ces moments là que j'ai le plus peur car je suis tellement heureuse que je ne me rends pas compte que je pourrais dépasser un seuil. Alors, je fais en sorte d'être attentive à ce que les autres me renvoient, comme par exemple quand mes filles me disent : "Maman, on dirait que tu es une adolescente !" ou bien "Maman, calme-toi, tu parles trop et trop fort !", je prends cela comme un signal et je régule ma journée en limitant les stimuli. Je ralentis ma pensée accélérée en m'absorbant dans des activités calmes, de façon un peu mécanique telles que le ménage, la lecture, le jardinage, ou un loisir créatif. Je m'impose de prendre un bain aux huiles essentielles pour me relaxer avant le coucher pour pouvoir faire une nuit de huit heures, ni plus ni moins. Quand mon sommeil redevient bon, je sais que je suis sur la bonne voie.

 

Un bilan, somme toute, très positif !

Depuis neuf ans, mon humeur fluctue et je ne sais pas comment je vais être en me réveillant le matin. Mais ce dont je suis sûre, c'est qu'avec de la régularité et en limitant le stress, j'arrive à juguler ces fluctuations de façon à avoir une vie agréable, et afin aussi que mon entourage se sente bien en ma compagnie. Il est certain que je ne serai jamais guérie, mais je me considère en rémission et cela depuis neuf ans.

Le traitement est bien sûr l'une des clés mais je pense que connaître son mode de fonctionnement en est une autre : savoir ce qui apaise, ce qui fait plaisir, ce qui donne du sens à sa vie. Tout cela permet de fonctionner normalement – et c'est déjà beaucoup, mais cela permet aussi d'atteindre une certaine forme de bonheur : car le bonheur nous est permis aussi !

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